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Monday, 06/12/2023 12:02:08 PM

Monday, June 12, 2023 12:02:08 PM

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Faire pousser du cannabis au Canada est un non sens! Ca coute trop cher!
Si les lps ne font pas faillite… les pays équatoriaux vont les décimer!

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1986649/producteurs-legaux-cannabis-argent

Pas d’argent facile pour les producteurs légaux de cannabis

La rentabilité n’est pas au rendez-vous pour bien des entrepreneurs qui se sont lancés dans la culture du cannabis. Certains s’en tirent mieux que d’autres, mais la plupart en arrachent.
Myriam Fimbry
2023-06-11

« On est quasiment une piasse pour une piasse. Ça vire, mais pour dire que ça vire », dit Alexandre Cloutier-Gagné, un microproducteur de cannabis en Beauce.

Après avoir désinfecté ses chaussures et revêtu une blouse et des lunettes de soleil, on entre dans une petite salle aux murs blancs et sans fenêtres, où poussent 72 plantes de cannabis en pot. Les feuilles bougent doucement sous l’effet du vent créé par 10 ventilateurs accrochés aux murs. Une lumière jaune très vif ensoleille la pièce.

L’homme de 37 ans, père de deux enfants, s’est lancé dans l’aventure peu de temps après la légalisation. Ancien facteur à Postes Canada, il avait toujours eu une passion pour le cannabis. Il en faisait pousser chez lui, à des fins personnelles, précise-t-il.

Des oncles et des frères ont mis la main dans leur poche pour rassembler l’investissement de départ, plus d’un million de dollars. Alexandre Cloutier-Gagné a ouvert une première usine à Saint-Benjamin en 2021, puis une deuxième plus grande à Beauceville en 2022. Les deux installations lui permettent de produire 700 kg de cannabis par an.

Mais les six employés sont au chômage depuis ce printemps, le temps de réorienter l’entreprise, ce qui devrait demander de quatre à six mois, selon le microproducteur.

Car les produits de Teca Canna n’ont pas été retenus par la Société québécoise du Cannabis, après avoir été pris à l’essai sur les étagères. Il fallait performer autant que les gros joueurs qui étaient déjà inscrits depuis longtemps et déjà connus, explique l’entrepreneur. C’est quasiment impossible pour une petite compagnie de percer de cette manière-là.

Alexandre Cloutier-Gagné tient un sac en plastique transparent rempli de cannabis séché.
Le PDG de Teca Canna, Alexandre Cloutier-Gagné, couvre à peine ses frais de production en vendant ce sac de 2 kg de cannabis en vrac.
PHOTO : RADIO-CANADA / MYRIAM FIMBRY
Alexandre montre des sacs en plastique remplis de belles grosses cocottes, des fleurs de cannabis séchées, entreposées dans une salle. Il les soupèse, il y a bien 2 kg par sac. Actuellement, le marché est saturé, il y a beaucoup trop de cannabis pour ce qu’on peut revendre.

La réglementation empêche les producteurs de cannabis de faire de la publicité. Même sur leur site web ou sur les réseaux sociaux, ils ne peuvent essayer de mettre en valeur leur produit, par exemple en évoquant des saveurs ou des effets, pour attirer des clients. Au Québec, en dehors du réseau de succursales de la SQDC, il y a peu de manières de se faire connaître.

Teca Canna a trouvé des fournisseurs dans d’autres provinces, en Ontario ou en Alberta, qui ont accepté de lui acheter son stock en vrac, mais à bas prix, parce qu’ils ont l’embarras du choix. Présentement, dans l’industrie, les gros joueurs ne se donnent même plus la peine de produire. Ils peuvent acheter le cannabis pas cher, comme à nous autres, et l’emballer eux-mêmes avec leur licence d’emballage, résume le PDG de Teca Canna.

« Pour nous, un coup tous les employés et les frais payés, il reste très peu de bénéfices. »
— Une citation de Alexandre Cloutier-Gagné, PDG de Teca Canna
À Terre-Neuve, une entreprise artisanale au désespoir

Ce n’est pas qu’au Québec que le seuil de rentabilité est difficile à atteindre. À Corner Brook, dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador, la petite entreprise BeeHighVE est au bord du désespoir.

Rita Hall porte un filet vert de protection sur les cheveux, des gants bleus et un masque d'intervention sur le visage. Elle regarde une fleur de cannabis.
Rita Hall examine le cœur d'une fleur de cannabis à son usine de Corner Brook, à Terre-Neuve-et-Labrador.
PHOTO : RADIO-CANADA / MYRIAM FIMBRY
La PDG Rita Hall et son mari, Mark German, y ont investi toutes leurs économies et celles de leurs proches. Ils avaient vécu de belles réussites précédemment dans les technologies de l’informatique. Or, depuis quatre ans, ils ne font que perdre de l’argent. Des millions de dollars.


Ils imaginaient ce secteur plein d’avenir et pensaient que la recherche médicale lui donnerait un nouvel élan. Encore aujourd’hui, ils s’investissent corps et âme dans leur usine et, du matin au soir, ne voient que la lumière artificielle éblouissante qui stimule la croissance de leurs 800 plants de cannabis.

Quand on demande à Rita Hall pourquoi elle continue dans ce secteur malgré les pertes, les larmes lui montent aux yeux. Elle montre la clé en forme de médaillon qu’elle porte autour du cou. Elle s’en sert pour circuler dans l’usine et en franchir chacune des portes ultrasécurisées.

Quand j’ai commencé, je la portais avec fierté, dit-elle, la voix étranglée. Maintenant, c’est devenu un nœud coulant.

Elle refuse pourtant de se décourager et de tout arrêter. Trop d’amis, de proches, de membres de la famille ont cru en ce projet. Elle n’a pas d'autre choix que d’y croire encore. De continuer pour leur éviter de tout perdre.

Pas d'argent facile dans le cannabis

ÉMISSION ICI PREMIÈRE • Désautels le dimanche

Désautels le dimanche, ICI Première.

La bulle s’est dégonflée

Au début, lors de la légalisation au Canada en 2018, de nombreuses entreprises se sont lancées dans cette industrie, parfois avec des sommes colossales, atteignant des cotations de plusieurs milliards en Bourse. Aujourd’hui, après bien des fermetures de centres de production, c’est une minorité d’entreprises qui gardent la tête hors de l’eau, qu’elles soient petites, moyennes ou grosses.

Beaucoup à l’heure actuelle sont en train d’essayer de prendre des ententes avec leurs créanciers ou de se restructurer, souligne Pierre Leclerc, directeur général de l’Association québécoise de l’industrie du cannabis (AQIC).

Pierre Leclerc dans un café-restaurant.
Pierre Leclerc, directeur général de l'AQIC, représente 90 entreprises dans l'industrie du cannabis au Québec. La plupart ont des difficultés financières.
PHOTO : RADIO-CANADA / MYRIAM FIMBRY
Pierre Leclerc a été directeur de cabinet au sein du gouvernement du Québec. Il a travaillé avec la ministre Lucie Charlebois à mettre en place la réglementation provinciale sur le cannabis. Il s’inquiète maintenant pour la réussite de la légalisation.


Selon lui, c’est impossible de combattre le marché noir si les entreprises légales ne sont pas rentables et mettent l’une après l’autre la clé sous la porte. Je peux rassurer tout le monde, une industrie va survivre, dit-il, un brin cynique. Quand on a voulu prohiber le cannabis, on n’a pas réussi.

Penser comme un agriculteur

L’entreprise 5 points Cannabis, à Pierreville, près de Sorel-Tracy, s’en sort mieux que d’autres dans les circonstances. Au départ, on se lançait dans la production de cannabis avec plein d'ambition : travailler quatre, cinq ans, puis passer le restant de notre vie sur un bateau à la chaleur des Caraïbes, raconte le directeur général Joël Lalancette, avec un bon sens de l’autodérision.

Ce scénario est à oublier. Il n’y a pas – ou plus – d’argent facile dans le cannabis. Même pour une entreprise de taille moyenne comme 5 points Cannabis, qui a réussi à se tailler une place sur les étagères du Québec et de plusieurs autres provinces.

Joël Lalancette tient la porte de la salle où pousse du cannabis.
Le directeur général Joël Lalancette nous invite à entrer dans l'une des salles de floraison de 5 points Cannabis, à Pierreville.
PHOTO : RADIO-CANADA / MYRIAM FIMBRY
L’entreprise s’est agrandie une fois et se contente de 20 000 pieds carrés, au lieu des 200 000 envisagés. Et on est très heureux comme ça, insiste Joël Lalancette. C’est notre taille maximale pour les prochaines années. Le marché ne permet plus d’agrandissement. Nous, notre accès limité aux capitaux nous a probablement sauvé la vie.

L’homme de 50 ans met à profit son expérience d’agriculteur pour réussir dans son domaine. Avant le cannabis, il produisait 300 tonnes de fraises par an. Le cannabis, c’est une plante, c’est du vivant. Au final, c’est de l’agriculture. Il faut contrôler le climat et la lumière.

Il pense toujours comme un agriculteur qui veille sur ses plantes et contrôle chaque coût, choisit soigneusement chaque équipement. Il investit dans la recherche et le développement, pour essayer de garder un coup d’avance. Si on s'assied une semaine sur nos réussites, à tous les coups, c'est une claque en arrière de la tête.

Un ménage nécessaire

Selon lui, un certain ménage dans l’industrie est bénéfique, pour sortir du marché ceux qui ne connaissent pas grand-chose en entrepreneuriat ou en agriculture et qui n’arrivent pas à vendre leurs produits.

Elles n’ont pas d'affaire là, mais elles produisent encore, puis font tomber le prix du marché et nuisent aux entreprises qui font les choses correctement, estime Joël Lalancette dans des mots un peu durs. S'il n'y a pas de ménage qui se fait, dans trois ans, il n'y aura plus personne.

L’entreprise de taille moyenne embauche 60 employés et produit 3 tonnes de cannabis par an. Mais elle n’est pas à l’abri non plus de jours plus difficiles.

Une femme en blouse et gants bleus assise à une table en métal devant un grand bol et des fleurs de cannabis séché.
L'entreprise 5 points Cannabis emploie 60 personnes. Ici, la salle de « manucure » des fleurs de cannabis. Chaque fleur est débarrassée de ses feuilles à la main, avec de petits ciseaux.
PHOTO : RADIO-CANADA / MYRIAM FIMBRY
Au moment de notre visite, l’un de ses assureurs venait d’annoncer qu’il se retirait du secteur du cannabis. Il ne se passe pas une journée sans devoir régler un problème, soupire l’entrepreneur.

« On peut avoir 50 produits sur les tablettes, puis dans six mois on peut en avoir juste 20. Il faut avoir des plans B, des plans C, des plans D… double Z, je pense. »
— Une citation de Joël Lalancette, directeur général de 5 points Cannabis
Les institutions financières sont aussi très hésitantes à prêter de l’argent, si ce n’est pas carrément à ouvrir un compte en banque à une nouvelle entreprise, ce que l’industrie du cannabis attribue à une image encore négative qui la suit. Un recours collectif à ce sujet, lancé par l’entreprise Origami Extraction, attend d’ailleurs d’être autorisé.

Appel à des aides et subventions

Nous ne sommes pas soutenus par le gouvernement, d’aucune manière, regrette Rita Hall, de BeeHighVE. Alors que c’est une industrie multimilliardaire qui lui rapporte beaucoup d’argent, la plupart des compagnies de cannabis échouent, font faillite ou déposent leur bilan. Le gouvernement doit arrêter de prendre une si grande part de nos revenus.

Elle estime que les différents gouvernements provinciaux devraient au contraire commencer à soutenir cette industrie, par des aides ou des subventions, comme c’est le cas pour les autres cultures et produits de l’industrie agricole.

Fleurs de cannabis.
Stade de floraison des plantes de cannabis à l'usine 5 points de Pierreville, au Québec.
PHOTO : RADIO-CANADA / MYRIAM FIMBRY
Selon l’entrepreneure de Terre-Neuve, qui a été la première à obtenir une licence de cannabis dans la province, l’enjeu est que l’industrie légale de cannabis puisse continuer. Parce que l’autre marché, le marché illégal, est encore en train de grossir, je peux le voir. C’est vraiment problématique.

D'après des estimations du Conseil canadien du cannabis et de Statistique Canada, le marché noir accapare encore environ la moitié de la consommation de cannabis au Canada.

La réglementation pointilleuse et les taxes élevées, imposées aux producteurs légaux, sont montrées du doigt.

Un ajustement est nécessaire, selon Pierre Leclerc, de l’Association québécoise de l’industrie du cannabis.

« Il faut ajuster le système de taxation pour permettre aux entreprises de dégager des profits, mais de rester avec des prix de vente qui, au détail, seront compétitifs avec le marché illicite. »
— Une citation de Pierre Leclerc, de l’Association québécoise de l’industrie du cannabis
La taxe d’accise, par exemple, prélève toujours un dollar sur chaque gramme de cannabis vendu, malgré la chute des prix depuis 2018, qui sont passés en moyenne de 10 $ à 3 $ le gramme en l’espace de cinq ans.

Pots de 3,5 grammes étiquetés par des employés.
Chaque pot de 3,5 grammes de cannabis est scellé par un timbre d'accise. C'est une taxe que l'entreprise doit payer au gouvernement fédéral, 1 $ par gramme.
PHOTO : RADIO-CANADA / MYRIAM FIMBRY
Les frais pour assurer la sécurité des usines sont aussi astronomiques. Il n’y a pas un pouce carré d'un site qui cultive du cannabis qui n’est pas couvert par une caméra! s’exclame Pierre Leclerc. Et il faut garder ces images-là pendant un minimum d'un an, en cas d’inspection. Pourquoi ne pas se limiter à trois mois?

Pierre Leclerc comprend l’importance de normes très strictes de salubrité et de sécurité. Il fallait commencer de façon très prudente, pour s’assurer d’avoir une industrie d’une probité exemplaire. Mais aujourd’hui, je pense qu’on peut relaxer certaines normes.

Le prix ou la qualité

Ni taxé ni réglementé, le cannabis est moins cher sur le marché noir.

Mais le prix n’est pas le principal critère, selon la chercheuse en économie Tiffanie Perrault. Pour sa thèse de doctorat, présentée l’an dernier à l’Université de Montréal, elle a étudié l’impact de la légalisation sur les marchés illégaux du cannabis, dans certains États américains : l’Oregon, le Colorado et Washington.

« Les gens sont sensibles au prix, mais vont aller se servir sur le marché noir parce qu’ils ne trouvent pas les produits qu’ils veulent sur le marché légal. »
— Une citation de Tiffanie Perrault
Tiffanie Perrault devant des bâtiments universitaires.
La chercheuse Tiffanie Perrault a étudié les marchés illégaux du cannabis dans des États américains qui ont légalisé la substance.
PHOTO : RADIO-CANADA / MYRIAM FIMBRY
Elle estime que la qualité va être le moteur pour se débarrasser du marché noir. Par qualité, elle entend le taux de THC (tétrahydrocannabinol), la variété des produits, l’expérience d’achat et même l’attrait des emballages.

On a besoin de laisser les producteurs se différencier et commercialiser leur marque, pour qu’ils puissent s’en sortir, dit la chercheuse maintenant au postdoctorat à McGill.

Un récent rapport du Bureau de la concurrence? (Nouvelle fenêtre)? va dans le même sens. Il invite le gouvernement fédéral à assouplir les restrictions, de façon à mieux concurrencer le marché illicite.

En attendant, Teca Canna, à Beauceville, se tourne vers l’international. On a été capables d’avoir un beau contrat, dit le propriétaire Alexandre Cloutier-Gagné. Pour l’avenir, on va se concentrer sur l’exportation.

D’autant plus qu’une partie de son cannabis dépasse la concentration de THC permise au Québec.

Alexandre Cloutier-Gagné sortant d'un grand bâtiment aux murs gris.
Alexandre Cloutier-Gagné prend un appel en sortant de l'usine de Teca Canna à Beauceville. Rien ne laisse deviner que du cannabis pousse à l'intérieur du bâtiment, comme le demandent les assureurs.
PHOTO : RADIO-CANADA / MYRIAM FIMBRY
Il est déçu et découragé de ne pouvoir vendre ses produits localement. Mais on n’a pas le choix. On a tout mis de côté, tout lâché, changé de carrière, investi beaucoup. Mais c’est une passion encore. Faut pas faire ça juste pour l’argent.